Ah, l’appât du gain facile !

Depuis quelques mois le Bénin est frappé de plein fouet par un énorme scandale financier qui n’arrête pas de faire couler beaucoup d’encre et de salive.

A juste titre, nous sommes très nombreux à dénoncer et à condamner le comportement des auteurs de ce scandale et de tous ceux qui, d’une manière ou d’une autre, leur ont facilité la tâche.

Quant aux victimes, nous ne parlons d’elles que pour les plaindre. Pourtant, elles sont loin d’être irreprochables. Ce scandale n’aurait sans doute pas eu lieu si elles ne s’étaient pas rendues coupables d’une trop grande naïveté.

Elles avaient souscrit à des placements qui, leur avait-on dit, pouvaient leur rapporter des pactoles. Celui qui plaçait cinq cent mille francs (500 000 F) par exemple pouvait, en quelques mois, se retrouver avec la coquette somme de dix millions de francs (10 000 000 F), non compris le capital.

Pour ceux qui sont raisonnables, cela était trop beau pour être vrai. Quelle est cette activité, même illicite, qui, exercée en quelques mois seulement, peut permettre d’amortir le capital, de couvrir toutes les charges et de dégager une marge bénéficiaire au moins deux cent fois supérieure au capital ?

La logique et le bon sens devraient faire tiquer les souscripteurs et les inciter à la plus grande prudence, surtout qu’avant le Benin des pays dont la Côte d’Ivoire avaient déploré des arnaques identiques, fortement médiatisées. Hélas ! C’était trop demander à des gens obnubilés par l’appât du gain facile !

Personnes ne peut dire qu’il n’aime pas l’argent sans être en désaccord avec sa conscience. Tous, nous avons le souci de gagner notre vie, et même de  faire fortune. Mais nous ne pouvons y arriver que par le travail ; lui seul peut nous garantir une richesse sans tâche, profitable et durable.

En voulant s’enrichir par des raccourcis, les victimes d’ICC-Services auront appris à leurs dépens que la facilité rime avec la perte et les regrets. Mais leur mésaventure pourra-t-elle servir de leçon à ceux, très nombreux, à qui des escrocs aussi talentueux les uns que les autres ne cessent de jeter de l’appât ? Rien n’est moins sûr !

C’est très souvent, pour ne pas dire tous les jours, que la presse se fait l’écho d’exploits réalisés par des multiplicateurs de billets de banque. Des adultes accomplis et sains d’esprit ont la naïveté de croire qu’ils peuvent gagner de l’argent en quantité industrielle grâce aux incantations de marabouts ou de charlatans, qui ne sont en réalité que d’habiles prestidigitateurs.

L’expérience a montré que la plupart de ces escrocs opérant dans ce domaine sont de pauvres types qui vivent dans des bidonvilles. Il faut être d’une naïveté primaire pour aller chercher le secret de la richesse chez des gens qui tirent le diable par la queue. Cette crédibilité-là, nombreux sont ceux qui s’en rendent coupables tous les jours.

Des enquêtes montreraient que, curieusement, ceux-ci sont en majorité des lettrés, c'est-à-dire des gens qui sont allés à l’école et qui savent comment l’argent se fabrique. Mais le désir irrésistible de s’enrichir vite et dans la facilité les pousse à se comporter comme des ignares. C’est quand des escrocs les ont ramenés sur terre qu’ils cherchent à montrer qu’ils sont des « intellectuels ».

Dans les commissariats de police, dans les brigades de gendarmerie comme dans les palais de justice, on les voit s’agiter dans tous les sens, bomber le torse, se taper la poitrine et développer des arguments si pertinents qu’on se demande comment on a pu les flouer.

Nous sommes très nombreux à être tous les jours victimes de notre propre turpitude. Mais, non moins et peut-être même plus important est le nombre de ceux que la cupidité pousse à commettre des crimes et délits, troublant ainsi l’ordre public.

Au moment où vous lisez ces lignes, des crapules sont sans doute en train ou sur le point de donner la mort à leurs semblables pour avoir de l’argent. La corruption, les détournements de deniers, les prises d’otages, les trafics d’êtres et organes humains et autres actes de cupidité aussi crapuleux les uns que les autres sont aujourd’hui légion. Que ne ferait-on pas pour du pognon !

On ne peut que regretter cet état de choses. Inventé par l’Homme pour son bien-être, l’argent est devenu une source de malheurs pour tant d’hommes et de femmes. Du serviteur qu’il devait être pour nous, il est devenu notre maître. Il n’y a rien qu’il ne puisse pas nous faire faire aujourd’hui. Quel dommage !

                                                                             Fodjo Kadjo ABO