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 Fodjo Kadjo ABO

Quand des Africains rêvent debout

10 Novembre 2012, 22:07pm

Publié par Fodjo Kadjo ABO

DSC_0007-copie-1.jpgComme en 2008, les élections présidentielles de novembre 2012 aux Etats-Unis d’Amérique ont fait couler beaucoup d’encre et de salive en Afrique et dans les milieux des Africains de la diaspora.

 

Barak Obama, alors candidat à sa propre succession, a été et continue d’être au centre d’une controverse. Il avait la faveur de certains, qui se sont réjouis de son élection ; d’autres ont eu une attitude contraire. Mais tous se rejoignent sur un grief : l’Afrique n’a pas profité du tout ou assez de son premier mandat.

 

Sur ce point de convergence, les critiques contre le président américain n’ont pas été du tout tendres. Et très nombreux sont ceux qui, après son élection, continuent de lui jeter la pierre en exprimant le vœu qu’il change d’attitude aide les pays africain au cours de son second mandat.

 

J’ai écouté, parfois en souriant, les récriminations de tous ceux qui jugent le bilan de Barak Obama par rapport à ce que les Africains attendaient de lui après son élection en 2008. J’y ai consacré des moments de réflexions attentives dont je me fais le devoir de partager le fruit avec vous sur mon modeste blog.

 

Né d’un père Kenyan, Barak Obama est d’origine africaine. S’il avait vécu au Kenya comme bien d’autres métis, il aurait pu être le président ou en tout cas un haut cadre de ce pays. Jerry Rawlings, un autre métis né d’un Ecossais et d’une ghanéenne, n’a-t-il pas été président du Ghana pendant plus de deux décennies ?

 

Mais la vérité est que Barak Obama, malgré ses origines africaines et la couleur de sa peau, est avant et après tout un Américain. C’est à ce titre qu’il a été élu et réélu par des Américains pour gouverner les Etats-Unis d’Amérique.

 

Il a été élu et réélu sur la base d’engagements pris auprès du peuple américain. C’est par rapport à la tenue ou au non respect de ces promesses que son bilan doit être jugé. Il n’est donc pas raisonnable ni juste d’évaluer son mandat par rapport aux attentes des Africains.

 

Pour les Américains, Barak Obama a été un très bon président au cours de son premier mandat. C’est pour cette raison qu’ils lui ont renouvelé leur confiance et lui ont accordé un second mandat. Il faut donc que les Africains reviennent sur terre et arrêtent de prendre leurs rêves pour des réalités.

 

Barak Obama n’est pas l’élu des Africains. Il n’a pris aucun engagement envers eux et n’a, de ce fait, pas de comptes à leur rendre. Tout ce que ceux-ci peuvent lui demander ou attendre de lui, c’est de se souvenir de ses origines et de se montrer bienveillant envers l’Afrique ; et la bienveillance n’est pas obligatoire.

 

En tout état de cause, avant de reprocher à Barak Obama de n’avoir pas aidé les pays africains, nous devons nous demander, nous les citoyens de ces Etats, ce que nous avons fait et faisons nous-mêmes pour leur développement.

 

« Aide-toi et le Ciel t’aidera », dit une maxime populaire. Avant de reprocher au président des Etats-Unis d’Amérique de ne pas aider nos pays, nous devons nous préoccuper de savoir ce que nous les fils et filles de ces Etats faisons nous-mêmes pour contribuer à leur développement.

 

En vérité, tout porte à croire que dans l’état actuel des choses ce qui nous intéresse et nous préoccupe par-dessus tout, nous les Africains, c’est le contrôle du pouvoir et notre avenir après la mort.

 

L’expérience de la vie quotidienne a montré qu’en Afrique, la plupart des opposants et gouvernants sont obnubilés par l’exercice du pouvoir. Les premiers luttent pour y accéder et les seconds pour s’y accrocher. Et tous sont soutenus dans leurs combats par leurs partisans respectifs, qui semblent avoir relégué le développement de leurs pays au troisième plan, après la politique et la religion.

 

C’est sur ces terrains que les aides des pays développés sont attendues. Du comportement de nombre d’acteurs politiques africains et de leurs suiveurs respectifs on peut déduire que la bienveillance des dirigeants de ces puissances s’apprécie moins par les actions de développement réalisées ou envisagées que par les soutiens politiques qu’ils leur assurent.

 

Autrement dit, ce que les opposants et gouvernants africains et leurs partisans respectifs attendent le plus des dirigeants des grandes puissances, c’est de les aider à accéder ou à se maintenir au pouvoir.

 

Barak Obama est trop raisonnable et trop pragmatique pour accompagner les Africains dans pareilles aventures. En témoignent les réflexions suivantes, faites dans le discours qu’il avait prononcé lors de sa visite au Ghana, en juillet 2009 : « L’Afrique n’a pas besoin d’hommes forts mais d’institutions fortes ».

 

Par ces réflexions, dont beaucoup ne semblent pas avoir perçu le sens véritable, il a voulu dire que ce qui importe à ses yeux et l’intéresse, ce ne sont pas les ambitions personnelles des gouvernants et opposants africains et leurs partisans respectifs mais les intérêts supérieurs de leurs pays.

 

Le message de Barak Obama est très clair : si les Africains veulent qu’il les aide, ce n’est pas sur le terrain politique où ils s’entredéchirent à longueur de temps pour la défense de leurs intérêts personnels mais sur celui du bien-être des populations africaines, en d’autres termes sur celui du développent. A bon entendeur, salut !

 

« Si tu es maître de ton esclave, tu n’es pas maître de ses gris-gris », dit un proverbe abron. Barak Obama est le président des investisseurs américains, mais il n’est pas maître ni de leurs capitaux, ni de leurs volontés. Quelles soient sa puissance et sa bonne volonté, il n’a pas le pouvoir de renflouer les caisses des Etats africains avec l’argent des contribuables américains, encore moins d’obliger ses compatriotes à venir investir en Afrique.

 

Tout ce qu’il peut faire, c’est d’amener ceux-ci à s’intéresser au développement des pays africains. Mais peut-il se permettre de leur demander d’aller investir dans des Etats en proie à des crises sociopolitiques chroniques ou à des conflits armés ? Peut-il se payer le luxe d’inviter ses compatriotes à aller investir dans des pays dont les habitants passent leur temps à se battre pour le contrôle du pouvoir ?

 

Aucun investisseur en possession de toutes ses facultés mentales ne prendra le risque d’aller investir dans un pays en crise où les actes de vandalisme, les assassinats, les prises d’otage et les pillages d’entreprises sont érigés en moyens d’expression courants. Aucun investisseur désireux de vivre et soucieux de ses intérêts, quelles que soient l’énormité de sa fortune et son sens de l’humanisme, ne peut se permettre d’aller investir dans un pays en crise en étant bien conscient qu’il sera exposé à des risques de mort brutale, de perte d’êtres chers et de pillages.

 

Si nous les Africains nous voulons que Barak Obama nous aide, commençons par nous aider nous-mêmes en renonçant à cette vilaine mentalité qui nous porte à consumer nos forces et nos intelligences dans des luttes fratricides ayant pour unique but la défense d’intérêts mesquins. S’il avait lui aussi eu cette mentalité, il n’aurait jamais été président des Etats-Unis d’Amérique et il ne nous aurait pas donné l’occasion d’espérer son aide aujourd’hui.

 

Nous lui faisons un mauvais procès en lui reprochant de ne rien faire ou de ne pas faire assez pour nos pays pendant que nous attelons à les détruire avec passion et insouciance, à les rendre infréquentables au nom d’idéologies politiques et religieuses puériles.

                                                            Fodjo Kadjo ABO

                                                               magistrat-écrivain

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F
Hélas!<br /> Cela montre comment nous aimons l'assistance, même au risque de perdre notre dignité. Et pourtant, nous sommes le continent le plus riche en ressources humaine (jeunesse) et naturelle (matières<br /> premières). L'Afrique manque de confiance en elle et a toujours besoin d'un tuteur ou d'un Homme providentiel à qui notre destin peut être confié. Mais jusqu'à quand?<br /> Personne ne viendra faire notre bonheur à notre place si nous sommes incapable de nous fixer et de respecter des règles strictes et des institutions fortes. Même pas notre diaspora qui ne peut<br /> intervenir que de façon ponctuelle (envoi d'argent aux familles restées sur place). A cause de nos élites, nous sommes des éternels assistés. Ainsi, la population juge sa propre importance à<br /> l'assistance qu'elle reçoit. Si on l'aide, c'est qu'elle est reconnue, pas qu'elle en ait besoin ou pourrait faire autrement.<br /> Dommage.
Répondre
F
Hélas!<br /> Cela montre comment nous aimons l'assistance, même au risque de perdre notre dignité. Et pourtant, nous sommes le continent le plus riche en ressources humaine (jeunesse) et naturelle (matières<br /> premières). L'Afrique manque de confiance en elle et a toujours besoin d'un tuteur ou d'un Homme providentiel à qui notre destin peut être confié. Mais jusqu'à quand?<br /> Personne ne viendra faire notre bonheur à notre place si nous sommes incapable de nous fixer et de respecter des règles strictes et des institutions fortes. Même pas notre diaspora qui ne peut<br /> intervenir que de façon ponctuelle (envoi d'argent aux familles restées sur place). A cause de nos élites, nous sommes des éternels assistés. Ainsi, la population juge sa propre importance à<br /> l'assistance qu'elle reçoit. Si on l'aide, c'est qu'elle est reconnue, pas qu'elle en ait besoin ou pourrait faire autrement.<br /> Dommage.
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L
Comment construire des institutions fortes dans nos pays africains où gouvernants et oppositions ont, de tout temps, pensé qu'il est politiquement incorrect de s'accorder sur "le minimum essentiel"<br /> et de le faire savoir? Et pourtant, c'est sur le terreau des moindres accords (que les politiques ont le devoir d'obtenir dans l'intérêt du citoyen),que peuvent se construire des institutions<br /> fortes, capables de résister à toutes formes de changements politiques.
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F
<br /> <br /> Merci pour votre soutien et votre contribution, mon cher Lamine. J'en suis très sensible.<br /> <br /> <br /> Fodjo ABO<br /> <br /> <br /> <br />
K
Merci pour cette réflexion que je partage.
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F
<br /> <br /> Merci de votre commentaire, mon cher Koffi<br /> <br /> <br /> <br />