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 Fodjo Kadjo ABO

Interview de Fodjo Kadjo Abo par Le Jour Plus

22 Octobre 2018, 12:43pm

Publié par Fodjo Kadjo ABO

Interview de Fodjo Kadjo Abo par Le Jour Plus

Après la publication de son essai intitulé « Pour un véritable réflexe patriotique en Afrique » en 2011, qui a été vendu à plusieurs exemplaires, le magistrat Fodjo Kadjo Abo a su imposer son écriture aux Ivoiriens. Dans cette interview, réalisée par Rodrigue Konan, il explique l’origine du drame de l’Afrique.

 

Quand et comment êtes-vous mis à l’écriture ?

 

Tout jeune, je rêvais d’être magistrat. Ce rêve fut bouleversé quand, arrivé  au second cycle, je pris goût aux lettres, en particulier à la philosophie. Je me trouvai alors confronté à un conflit d’ambitions. Sans avoir renoncé à mon désir d’être magistrat, je caressais celui de devenir écrivain.

     

Mon embarras était si profond que lorsque je fus orienté à la Faculté de droit de l’Université d’Abidjan après l’obtention du BAC, en 1978, l’envie me vint de changer et de m’inscrire au Département de philosophie ou, à défaut, au Département de sociologie.

      

Je m’étais ouvert à mon cousin, feu Yao Téhua James, alors en année de licence au Département d’anglais de la même université. Il me conseilla de rester à la Faculté de droit. Mais ses conseils, quoique sages, n’avaient  nullement dissipé mon embarras.

      

Je me rendis à la Direction de la scolarité pour voir s’il ne me serait pas possible de faire un transfert. Là, on me fit savoir que c’était possible mais que je risquais de perdre ma bourse. Face à cette réponse et sachant que je ne pouvais pas poursuivre mes études sans bourse, je me résolus à rester à la Faculté de droit à mon corps défendant.

     

Après mes études de droit, je suis entré à la Magistrature où je fais mon parcours professionnel. Mais, comme le dit un adage, «chassez le naturel, il revient au galop». À la faveur des événements douloureux déplorés çà et là en Afrique et d’une triste expérience que j’ai eu à vivre, je n’ai pu résister à la tentation de prendre la plume, devenue aujourd’hui mon compagnon.

     

Combien de temps vous prend l’écriture d’un ouvrage ?

 

Tout dépend du volume de chaque ouvrage et du sujet traité. Les volumes de de mes livres varie entre de 152 et 252 pages. Évidemment, ceux qui sont plus volumineux et ceux dont l’écriture requiert beaucoup de recherches demandent plus de temps que les autres.

 

Il faut dire aussi que je suis un fonctionnaire encore en activité. De ce fait, je ne me consacre à l’écriture qu’à mes temps perdus. Il y a des périodes où je peux passer des semaines sans toucher à mon manuscrit. Il arrive aussi des moments où je dispose d’un peu plus de temps pour écrire.

 

Ce que je peux dire avec précision, c’est que mon dernier livre, intitulé « Au secours des alliances interethniques », et le prochain, que je viens de terminer, m’ont pris respectivement huit et dix mois.

 

Qu’avez-vous écrit et publié jusqu’à maintenant ?

 

J’ai commencé ma carrière littéraire en 2001 avec la publication de mon premier livre, un essai intitulé « Pour un véritable réflexe patriotique en Afrique ». Au moment où je vous parle, je totalise dix (10) titres, tous publiés aux Éditions L’Harmattan, en France. De manière générale, mes ouvrages parlent de l’actualité socioculturelle en Afrique.

 

Pourquoi avez-vous écrit ces livres et quelles ont été sont vos sources d’inspiration ?

 

Comme vous le savez, cela fait plus d’un demi-siècle que les pays africains ont accédé à la souveraineté. La plupart d’entre eux, sans cesse secoués par des convulsions publiques, des conflits fratricides et, de plus en plus, des attentats terroristes,  peinent à sortir du sous-développement.

 

Nombreux sont les intellectuels qui, interpellés et préoccupés par cette situation, se font le devoir d’y consacrer des moments de méditation. De leurs réflexions ont résulté des publications qui ne cessent d’alimenter les rayons des librairies.

 

En tant qu’intellectuel, je suis moi aussi interpellé et préoccupé par tout ce qui se passe dans le monde, en particulier en Afrique. À travers mes publications, j’ai bien voulu m’associer aux efforts de ces bonnes volontés et apporter ainsi ma modeste pierre à la construction de notre continent.

 

Nous avons ouïe dire que vous vendez beaucoup d’exemplaires par an depuis votre inscription chez Harmattan. Quel est votre secret ?

 

Depuis que « L’Harmattan-Côte d’Ivoire » a ouvert ses portes, mes livres sont mieux connus et vendus en Côte d’Ivoire. Mais les chiffres de vente ne sont pas aussi extraordinaires que vous le dites.

 

J’ai écrit sur des thèmes qui intéressent le grand public. J’ai utilisé dans mes livres un style accessible à tous. J’aurais donc bien aimé que beaucoup plus de personnes y aient accès. Mais, du fait qu’ils sont publiés en France, ils coûtent un peu plus cher que ceux qui sont édités en Côte d’Ivoire. Je crois qu’à ce niveau, « L’Harmattan-Côte d’Ivoire » est en train d’envisager la possibilité de faire éditer ses livres par « L’Harmattan-Sénégal ». Si ce projet aboutit, mes ouvrages seront vendus à des prix plus abordables. Du coup, beaucoup plus de lecteurs pourront se les offrir

 

Comment faites-vous la promotion de vos livres ?

 

Dès la parution de chaque nouveau livre, mon éditeur me confectionne une feuille de publicité que j’envoie par voie électronique à mes différents contacts et à des personnes, physiques comme morales, susceptibles d’être intéressées par l’ouvrage.

 

Je fais également la publicité de mes ouvrages sur mon blog et sur les réseaux sociaux.

 

Il m’arrive d’organiser des séances de dédicace qui sont pour moi un moyen de faire connaître mes livres au public. Certains évènements culturels sont aussi pour moi des occasions de dédicaces et de distribution au public des prospectus sur lesquels figurent ma bibliographie et chacun de mes ouvrages. L’année dernière, par exemple, j’étais au Salon International du Livre d’Abidjan et aux 8èmes Jeux de la Francophonie qui ont eu lieu à Abidjan. Cette année encore, j’étais au Salon International du Livre d’Abidjan avec mon propre stand.

 

Il m’arrive enfin de participer à des émissions littéraires sur des radios et des plateaux de télévision. Je n’oublie pas les interviews que j’accorde parfois à des journaux comme c’est le cas en ce moment.

 

Je voudrais indiquer, pour terminer la réponse à cette question, que cette année, je serai à « l’Adayé Kessiè », qui aura lieu du 31 octobre au 04 novembre prochain. Ce serait pour moi l’occasion de faire la promotion de mon dernier livre qui a inspiré le choix du thème de ce grand évènement cultuel brong : « les alliances interethniques ».

 

Quels sont vos projets d’écriture ?

 

J’ai plusieurs projets éditoriaux. C’est le temps qui me manque pour les réaliser. Comme je vous l’ai dit au début de notre entretien, l’écriture est pour moi une activité secondaire que j’exerce à mes temps perdus. Mais chaque fois que mes activités professionnelles me laissent un petit créneau, je reprends ma plume. Je viens de terminer le manuscrit de mon prochain livre qui a pour titre provisoire « Aventure suicidaire ». Il traite de l’immigration clandestine, un fléau qui ne cesse d’endeuiller l’Afrique.

 

Avec vous, on parcourt la planète sans risque de se perdre tant vous décrivez avec exactitude certaines cultures. Dites, comment vous faites ?

 

J’ai grandi dans un environnement culturel qui constitue pour moi un atout assez important pour ma carrière littéraire. Je n’ai pas de secret particulier, sauf que je mets un point d’honneur à préserver mon indépendance intellectuelle.

 

Il y a beaucoup de personnes très instruites qui pourraient faire une excellente carrière dans la littérature. Malheureusement, elles ne jouissent pas d’une autonomie intellectuelle.

 

À quoi répond ce choix d’écriture alliant littérature et le traditionalisme ?

 

Comme je l’ai déjà dit, à travers mes écrits, je veux apporter ma modeste pierre à la construction de l’Afrique qui, depuis plusieurs années, traverse une période de turbulence. Je suis de ceux qui pensent que les tourments qui secouent ce continent et font obstacle à son développement ont une bonne partie de leurs racines dans l’acculturation des Africains.

 

Les animaux aquatiques ne peuvent évoluer que dans les eaux, tout comme les singes ne sont à l’aise que sur les branches d’arbres et les chenilles dans les pourritures. De même, les peuples ne peuvent évoluer que dans leurs milieux ambiants.

 

Le drame de l’Afrique vient du fait que les Africains veulent évoluer en dehors de l’environnement culturel qui les caractérise. Ils ont fait table rase de leur passé culturel et veulent développer leur pays en se fondant sur la civilisation occidentale. Le résultat de cette erreur est que non seulement ils ont perdu les repères de leurs ancêtres, mais en plus la civilisation qu’ils ont adoptée ne leur sied pas.

 

Les Orientaux, comme les Coréens et les Chinois par exemple, sont restés très attachés à leurs cultures ancestrales, qu’ils ont enrichies en s’inspirant de la civilisation occidentale. Cela leur a valu d’être aujourd’hui dans le concert des grandes nations. Je pense que les Africains pourraient faire de même. Au lieu de renier ou de combattre les cultures héritées de leurs ancêtres, ils gagneraient à les préserver et à les enrichir en s’inspirant de la civilisation occidentale.

 

Que doit-on retenir de vous, homme de culture, de droit, politique qui a glané des lauriers tels que le Prix Haut de Gamme pour la littérature 2008 et le 2ème Prix d’Excellence 2017 pour la littérature ?

 

Je ne suis pas un homme politique. Dans ma carrière professionnelle, j’ai été un proche collaborateur de grands hommes politiques. Mais je n’ai jamais été tenté de faire de la politique. Mon statut de magistrat m’impose des obligations que j’ai toujours mis un point d’honneur à respecter.

 

Ce que l’on peut donc retenir de moi, c’est l’homme de droit et de culture. Et je profite de l’occasion que vous me donnez pour rendre grâce à Dieu. Aussi bien sur le plan professionnelle que dans le domaine de la littérature, Il m’a permis de faire une carrière honorable.

 

Le 16 juin 2011, un vent de changement a soufflé sur le Bureau ivoirien du droit d'auteur (Burida).Vous avez été nommé au poste de Pca en remplacement de Gadji Celi,  suspendu pour cause d'illégalité. Que retenez-vous de ce passage à la maison des artistes ?

 

J’ai fait une incursion très brève au Bureau Ivoirien du Droit d’Auteur. J’ai été successivement membre et président de son Conseil d’Administration. Je suis parti de cette structure chargé d’enseignements qui m’ont été très utiles en tant qu’homme attaché à l’école de la vie.

 

Aujourd’hui, les démons qui se sont emparés de cette maison ont refait surface avec son corolaire de crise en en point finir : Votre commentaire.

 

Depuis mon départ du Conseil d’Administration du Bureau Ivoirien du Droit d’Auteur, j’ai pris du recul. En tant qu’écrivain, je demeure membre de cette structure. Mais, pour des raisons personnelles, j’ai décidé de me ranger parmi les membres anonymes. Je ne souhaite donc pas faire de commentaires sur la situation que vous évoquez.

 

Pour vous, quelle solution pour rendre stable la maison des artistes afin de générer des fonds pour leur redistribuer ?

 

Comme je viens de le dire, je ne souhaite vraiment pas faire de commentaires sur la situation qui prévaut actuellement au Bureau Ivoirien du Droit d’Auteur. Et je vous remercie de me comprendre.

 

 

                                              Interview réalisé par Rodrigue Konan,

                                              journaliste au quotidien ivoirien Le Jour Plus

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