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 Fodjo Kadjo ABO

Les églises anarchiques : un business qui profite à la pauvreté.

2 Septembre 2008, 19:56pm

Publié par Fodjo Abo

  

 Cérémonie destinée à rendre hommage à Dieu ou à une divinité, la célébration d’un culte est avant tout une activité. Et ce ne sont pas toutes les activités qui, pour être pratiquées, nécessitent des moyens financiers. On n’a pas besoin de mettre la main à la poche pour faire du footing tous les matins ou pour arracher les mauvaises herbes de son jardin.

        
Il faut cependant reconnaître que de nos jours rares sont les activités qui peuvent être menées en dehors de l’argent, rendu incontournable par les exigences de la vie moderne. La pratique d’un culte fait-elle partie de ces activités ?

 
Une confession religieuse est avant tout une association d’hommes et de femmes partageant les mêmes croyances. Et toute association, pour être viable, a besoin d’avoir des ressources financières.

 
Un culte, qu’il soit moderne ou traditionnel, est pratiqué dans un édifice dont la construction et l’entretien nécessitent des moyens financiers. Dans les religions se disant révélées, il est célébré par des personnes ayant décidé de consacrer leur vie à Dieu et qui ont besoin d’être prises en charge. Les décors et autres objets indispensables à sa célébration ne tombent pas du ciel ; ils demandent à être achetés.

 
 Même le culte pratiqué individuellement ou en famille engendre des frais. Le chrétien qui se résout à prier chez lui a besoin d’avoir un support, ne serait-ce qu’une bible et un chapelet. Le musulman qui veut faire ses prières à domicile a lui aussi besoin d’avoir un boubou, un chapelet, une natte et une bouilloire pour ses ablutions. Pour sa part le tradireligieux ne peut faire des libations chez lui s’il n’a pas de boisson alcoolisée.

 
Toutes ces considérations, qui pourraient être développées davantage, montrent bien que l’argent est indispensable à la pratique d’un culte. Il va sans dire que celui qui adhère à une religion doit se préparer à contribuer financièrement à sa survie et à son fonctionnement. Mais cette participation ne devrait être exigée que dans la stricte mesure des besoins de la confession. Malheureusement, ce n’est pas ce qu’il nous est donné de constater dans la réalité.

          
Du moyen que l’argent devrait être dans la pratique du culte, il en est devenu le but dans certaines confessions, en particulier dans les sectes d’obédience chrétienne. Ce qui préoccupe les créateurs et les dirigeants de ces sectes, c’est moins l’enseignement de la parole de Dieu que la recherche du lucre. Et pour y arriver, ils sont prêts à commettre des actes de malhonnêteté qui font reculer bon nombre d’adeptes de Satan.

          
Que n’a-t-on pas fait, que ne fait-on pas et que ne ferait-on pas dans des sectes pour gagner de l’argent ? Des dîmes faramineuses, des quêtes abusives, des offrandes démentielles et des rackets saints sont devenus légion dans l’univers cultuel.

    
Des guides spirituels ont montré à quel point la cupidité peut pousser l’homme à être imaginatif. L’accès aux lieux de culte de certaines sectes est soumis au paiement
de droits d’entrée : comme si on allait à des concerts ! Dans d’autres sectes, la collecte des quêtes se fait avec des sacs en filets qui rejettent naturellement les jetons.

En 2007 une soi-disante prophétesse eût la lumineuse idée de vendre l'Esprit saint dans une localité e la Côte d'Ivoire. Sa trouvaille, quoique grotesque, lui assura un succès incroyale. Des foules de chrétiens ne trouvèrent pas ridicule de se bousculer dans de longues files d'attente pour acquérir son "produit". Elle était parvenue à leur faire croire qu'une dose de cette substance, administrée moyennant la somme de 2500 F cfa, leur conférera de pouvoirs occultes qui vont changer leur vies. Bien entendu, ces illuminés finirent  par se rendre compte de leur naïveté ; maisla bonne dame était déjà partie avec leur argent.    
    
De plus en plus, des jeux de hasard et des ventes aux enchères sont pratiqués dans des églises. Ces pratiques ont d’autant plus de succès que des fidèles ayant la naïveté de croire que des chaises, mouchoirs, vêtements et bijoux consacrés par des hommes de Dieu ont des pouvoirs miraculeux, sont prêts à les acquérir à prix d’or.

           
Les vœux constituent une autre assiette de revenus pour les sectes qui les pratiquent. Des gens qui désespèrent de recouvrer la santé, d’avoir des conjoints ou des enfants, ou encore qui veulent entreprendre des aventures ou des activités, réussir leurs études, avoir des emplois ou des promotions sont de plus en plus nombreux à faire, dans des églises, des vœux qui sont payants. Lorsque, même par pure coïncidence, leurs désirs sont satisfaits, ils honorent leurs engagements en remettant à leurs guides spirituels les sommes, souvent faramineuses, promises au Seigneur.

            
Dans presque toutes les Eglises, les prières demandées par des fidèles leur sont facturées alors qu’elles devraient être gratuites : elles font partie des prestations élémentaires que celui qui adhère à une religion est en droit d’attendre d’elle. A quoi sert-il de payer des impôts cultuels et de faire des offrandes si pour avoir droit à une messe d’actions de grâce ou à une bénédiction nuptiale un fidèle es obligé de mettre la main à la poche ? Quel intérêt un fidèle a-t-il à appartenir à une communauté religieuse si pour avoir droit à une cérémonie religieuse après son rappel à Dieu ses proches, même non chrétiens, sont obligés de délier la bourse ?

     
Il est regrettable de constater que de fervents chrétiens meurent dans l’indifférence de leurs communautés religieuses pour l’unique raison qu’ils doivent des arriérés de dîmes ou de deniers de culte. Même à jour dans le paiement de ces impôts, des fidèles exemplaires n’ont eu droit à des veillées funèbres et à des messes de requiem que grâce aux efforts financiers de leurs familles.

      
L’expérience a montré qu’en revanche des chrétiens non pratiquants et des pécheurs notoires ont eu droit à des honneurs religieux et à des prières interminables pour le repos de leurs âmes parce que, puissants ou issus de grandes familles, leurs obsèques avaient ou pouvaient drainer des foules génératrices d’importantes recettes. Sans gêne, on demande des quêtes ordinaires et des quêtes extraordinaires, ces dernières étant souvent prélevées deux, trois ou quatre fois.

     
 Dans certains pays, des Eglises rivalisent de plus en plus avec les pompes funèbres : on y organise des veillées funèbres, des levées de corps et des obsèques qui génèrent d’importantes recettes. Même les prestations des chorales que les défunts ont contribué à créer ou à entretenir de leur vivant sont facturées à leurs familles.

 

Il est bon de relever au passage que la musique religieuse, qui ne devrait servir qu’à faire des louanges au Seigneur, servent de plus en plus à animer des boîtes de nuit et autres débits de boissons ainsi que des mariages et funérailles profanes : elles rapporte de l’argent.

              
 Dans certains pays, l’organisation du pèlerinage à la Mecque donne lieu à des rackets, à des escroqueries, à des détournements de deniers, à des négoces et à des trafics de tout genre.

           
Sous le couvert d’activités religieuses, des guides spirituels sans scrupule se livrent à des trafics juteux et font des affaires. Le scandale des placements d’argent qui défraie la chronique en Côte d’Ivoire depuis plus d’un an a mis à nu l’affairisme de nombreux guides spirituels.

   
Aujourd’hui, il est de notoriété publique que des sectes ont servi de cadre pour la publicité des maisons de placements et pour des souscriptions massives. Pire, des guides spirituels ont disparu avec l’argent de souscripteurs, évalué à des centaines de millions de francs cfa.

   

Toutes ces réflexions, faites sous le contrôle de nombreux lecteurs, montre à quel point des confessions religieuses ont été dénaturées et détournées de leur but par des rapaces revêtus de soutanes.

       

L’argent est nécessaire et même indispensable à la pratique d’un culte. Mais des imposteurs ont réussi le tour de force de faire de l’accessoire le principal. De par leur volonté, l’argent ne sert plus à soutenir la pratique du culte ; c’est plutôt le culte qui est pratiqué pour gagner de l’argent. Cela est bien regrettable !

 

                                              Fodjo Kadjo ABO

                                              Magistrat-écrivain

 

 
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Cet article a été publié dans le magazine panafricain Afrique  Liberté, notamment dans son numéro spécial de novembre et décembre 2007                                                                                  

 

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